Interco mon amour…

Trois semaines des élections et tout le monde se découvre la fibre intercommunale, chacun se félicite de l’avancée démocratique que fut la dernière loi permettant l’élection directe des conseillers intercommunaux. Mais dans les faits, l’intercommunalité se retrouve, une fois de plus la grande oubliée de ces élections.

Ne nous voilons pas la face, les grandes décisions structurantes pour nos territoires seront prise dans les communautés de communes. Ces dernières seront de plus en plus les récipiendaires des dotations d’états et de transferts de compétences des communes, et par là même auront le véritable pouvoir de faire bouger les lignes. Mais comme toujours, les élus se considérant comme spécialistes et oints de la science infuse en matière d’intercommunalité (car cela est technique et compliqué donc les pauvres administrés ne peuvent comprendre) se sont accaparés les décisions : ici en ne politisant pas, là en écrivant un projet de territoire à quelques mois des élections, tuant ainsi toute velléité de débat démocratique et programmatique, et ailleurs en dénigrant l’importance de ce nouvel échelon administratif niant par la même la vérité et le sens de l’histoire.

Brisons un peu les tabous et rétablissons quelques vérités :

–          Non les élus ne sont pas les seuls à avoir la fibre intercommunale ; en effet, le citoyen lambda  sait, par sa quotidienneté, la réalité du bassin de vie auquel il appartient. Si je ne prends que l’exemple que je connais le mieux : le mien ; j’habite à Saint-Bonnet prés Riom, je travaille à Clermont-Ferrand, je fais mes courses à Enval ou Ménétrol, je vais chez le coiffeur au Cheix, ma fille joue au basket à Riom, mon fils fais du judo à Mozac, mon garagiste est à Malauzat ; en une semaine je fais pratiquement le tour de la moitié de la communauté (sans parlé des visites chez mes amis et parents…). Donc les habitants, par la force des choses, vivent la communauté et sont à même de la réfléchir aussi bien sinon mieux que des élus qui, car souvent malheureusement vieillissant, la conceptualisent plus qu’ils ne la pratiquent.

–          Non la loi électorale votée récemment n’est pas une avancée démocratique, mais plutôt une reculée voire un déni de démocratie. Pour moi une avancée c’est une amélioration de la situation passée intégrant une prise en compte des évolutions futures. L’électeur a-t-il réellement plus le choix qu’avant : Non le choix revient toujours aux colistiers lors de la composition des listes et l’électeur n’a même pas le choix de voter pour une liste à la commune et une liste à l’interco car les deux sont sur le même bulletin. Donc les colistiers (futurs élus communaux) ont toujours le même pouvoir : Faux, les règles abracadabrantesques de positionnement des candidats communaux sur la liste communautaire ôte une grande marge de manœuvre  dans le choix de qui sera à l’intercommunalité voir toute marge de manœuvre pour les communes de moins de 1000 habitants.

Les candidats doivent figurer dans le même ordre que celui de la liste de candidats aux élections municipales. Les candidats présentés dans le premier quart de la liste intercommunale doivent figurer, de la même manière et dans le même ordre, en tête de liste municipale. Tous les candidats de la liste intercommunale doivent figurer au sein des trois premiers cinquièmes de la liste municipale. Dans les communes de moins de 1 000 habitants, les citoyens éliront leurs conseillers municipaux et leurs conseillers communautaires à l’aide d’un bulletin de vote ne mentionnant que la liste des candidats aux élections municipales. Les conseillers communautaires seront désignés parmi les membres du nouveau conseil municipal élu, suivant l’ordre du tableau (maire, adjoints puis conseillers municipaux)

Pire encore, alors que l’Histoire avance enfin vers une limitation du cumul des mandats, cette loi fait quasi-obligation au maire de cumuler avec le mandat de conseiller communautaire sauf a, absurdité quand tu nous tiens, ce que son premier acte politique en tant que nouvel édile soit de démissionner de son mandat communautaire. (d’ailleurs une publication de cette statistique après les élections serait intéressante). N’aurait-il pas été plus simple d’acter le fait que les communautés sont des collectivités à part entière et d’organiser des élections dissociées (mais ayant lieu le même jour) pour la commune et l’intercommunalité où aucun lien, autre que politique, programmatique,  n’aurait été nécessaire entre les deux listes. D’aucun me répondront qu’il faut être élu communal pour représenter sa commune dans une intercommunalité ; à ceux-ci je conseillerais la lecture de nos lois qui permettent à un non- élu (voire non résident de la commune) de représenter cette dernière dans un syndicat intercommunal.

–          Oui les enjeux intercommunaux nécessitent une politisation du débat ! Je suis le premier à me battre pour expliquer que, même dans de toute petite commune, il y a un certains nombres, pas la majorité certes, de décisions qui sont politiques : pour exemple, la fixation du COS (Coefficient d’occupation des sols) ou des règles d’emprise au sol dans les documents d’urbanisme ont un réel impact sur la capacité à construire des citoyens les moins aisés (plus le COS est faible plus il faut de terrain pour construire une habitation décente en superficie et donc plus cela augmente le cout qui peut devenir discriminatoire). Donc, si même dans de toutes petites communes la politique importe que dire de communautés qui gèrent la petite enfance, l’action sociale, la politique de la ville, le logement etc…

Bien-sûr la critique est aisé et le lard fait grossir, mais est-il si compliqué de réunir, un ou deux ans avant les élections,  à l’intérieur d’une communauté de communes, tous les militants et sympathisants de Gauche afin de les faire ensemble réfléchir sur ce qu’est l’intercommunalité, ce qu’elle doit devenir et par quel chemin on y parvient ? Cela aurait eu l’avantage de faire partager la fameuse fibre communautaire, d’impliquer un maximum d’acteur dans la conception et la rédaction d’un programme (et donc d’avoir autant de défenseur acharné de ce dernier) et enfin de pourvoir intéresser des citoyens dans toutes les communes et de faciliter ainsi la constitution de listes partout et surtout en milieu rural et péri-urbain.

Mais comme le dis l’électeur croisé au marché « les politiques on vous voit toujours que six mois avant les élections. » Donc une fois encore on s’est réveillé un peu tard…

Mais bon ce ne sont là que les digressions d’un procrastinateur !

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